Transat Jacques Vabre. Le Cléac’h : « Faire les bons choix cet hiver »
Deuxièmes derrière Vincent Riou et Sébastien Col (PRB), Armel Le Cléac’h et Erwan Tabarly étaient contents de leur place, surtout avec un « Banque Populaire VIII », mis à l’eau il y a cinq mois. Une belle complicité entre les deux hommes qui a permis d’appréhender ce nouvel Imoca à foils. Le monocoque rentrera en France en cargo pour un chantier assez important cet hiver.
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> Deuxième derrière « PRB », c’est une belle place ?
« Super. Content d’être arrivé au bout avec le bateau et d’avoir pu jouer la gagne quasiment toute la course. On a été battu par plus fort que nous mais les objectifs ont été quasiment tous remplis : entre le fait d’arriver avec le bateau; terminer avec le nouveau bateau; avoir pu mener la course un moment et une deuxième place au final, c’est bien ».
> Surtout avec un bateau mis à l’eau il y a cinq mois ?
« C’est une belle perf. Surtout que les conditions ont été quand même très dures. Il y a eu de la casse, des conditions de mer et de vent assez fortes. On avait été voir la direction de course pour éventuellement décaler le départ en disant que ça allait être compliqué. Mais on est parti le jour prévu. Et sur la route qu’on a prise et la route sud, tout le monde a subi des grosses conditions et finalement, il y a eu une hécatombe et on est content d’être passé au travers des embûches. Et d’avoir amené le bateau au bout sans grosse avarie ».
> Quand on apprend les nombreux abandons, change-t-on sa façon de naviguer ?
« Finalement, on avait commencé à se mettre dans un mode « conservateur ». De lever un peu le pied avant que les premiers bateaux abandonnent dans notre catégorie. Et c’est vrai, que quand on a eu cette série d’abandons, on a commencé à se poser quelques questions bien sûr. On a eu l’équipe technique pour savoir ce qui s’était passé sur le bateau. Certains avaient des problèmes de structure. Ce sont des bateaux récents qui demandent à avoir du temps pour les optimiser, les fiabiliser. On a surveillé ça de près surtout la première semaine qui était une semaine compliquée avec des conditions de mer soutenues. Et finalement, on est passé sans trop casser donc ça, c’est bien. »
> Vous n’avez donc pas eu de soucis structurels sur « Banque Populaire VIII » ?
« On n’a pas eu de problèmes structurels. On a eu des problèmes d’énergie mais c’est normal d’avoir quelques problèmes sur un bateau neuf. C’était un peu compliqué pour recharger les batteries. On a pas mal sorti la caisse à outils et passé du temps avec l’équipe à terre et on a découvert pas mal de petites choses. C’est normal, ça fait partie de la découverte d’un bateau neuf. On a mis un peu la main à pâte avec Erwan (Tabarly) mais on a eu un bateau quasiment à 100% de son potentiel tout le temps et de justement pouvoir jouer la bagarre avec « PRB » et « Quéguiner » ».
> Justement, cette bagarre a été hyper intense entre vous trois. Vous avez dû arriver bien fatigués ?
« C’était intense et engagé avec la météo et le parcours. Les transats sont toujours compliquées, ce sont des sprints. Et encore plus d’être au coude à coude avec les autres bateaux, avec des très bons équipages, des marins qu’on connaît bien. Cela a ajouté en intensité. On s’est vu avec « PRB » dans le Pot au Noir, on a aperçu aussi « Queguiner » pas très loin. Jusqu’au bout, la lutte était intense. Mais c’était super. On discutait avec Yann (Eliès) et Vincent (Riou) et on se disait que c’était super, c’est aussi ce qu’on vient chercher : faire des courses et des bagarres intenses comme ça sur l’eau. On aurait bien aimé avoir les autres aussi avec nous mais il y a eu des avaries. ».
> Une sacrée bagarre avec des bateaux bien différents. Vous avez dû apprendre plein de choses sur votre nouveau plan Verdier/VPLP ?
« Le podium à l’arrivée est assez hétéroclite. Un bateau neuf comme le mien et un « PRB » qui est une des références « ancienne génération », qui sont abouties et maîtrisées par leur skipper à 100%. Ils ont su faire évoluer leur bateau pendant trois-quatre ans pour l’amener à un tel potentiel. Nous on sait qu’on a une marge de progression importante. Et c’est sûr qu’on a appris un tas de choses avec Erwan, avec l’équipe technique aussi, à terre avec les retours qu’on a eus. On sait qu’on peut améliorer les choses. Plein de petits détails permettront d’être encore plus performant l’an prochain. L’objectif, c’est le Vendée Globe et ça va venir vite. Lors du chantier d’hiver qui arrive dans quelques semaines, il sera important de faire les bons choix pour attaquer l’année prochaine ».
> Quelles sont les pistes de travail pour cet hiver ?
« On en avait déjà avant de partir. On avait relevé des petites choses en naviguant, aux entraînements et aux sorties. On a ajouté quelques lignes dans la job-list. Il faut faire évoluer certaines choses pour la performance; au niveau des foils aussi. C’était la première version et quand on voit comment l’histoire s’est déroulée au niveau des multicoques entre les premiers foils et les foils actuels… Nous aussi, on va aller dans ce sens-là. Et ce qui s’est passé sur les bateaux récents comme le nôtre avec les problèmes de structure, je pense que les architectes vont pouvoir nous donner les bons éléments pour que le bateau soit bien solide pour le Vendée Globe. Tout le monde en est conscient. Il y a quatre ans, on avait eu le cas : avant la Jacques Vabre, on avait ouvert le bateau en deux et on avait failli couler. Ce n’est pas juste cette année, ça arrive. Cela fait partie du jeu : on veut des prototypes, des bateaux performants toujours plus légers mais solides. Par moment, selon l’état de la mer, ça peut engendrer des problèmes de structure donc là, on va le renforcer et le bateau sera bien préparé pour le Vendée Globe ».
> Au niveau de vos foils, vous n’avez pas eu de souci a priori : comment les avez-vous ressentis ?
« Il y a des moments où ça va vraiment bien. On l’a prouvé après la dépression puisqu’on a réussi à prendre la tête de la course quasiment en vitesse pure. On était sur la même trajectoire et c’était vraiment la vitesse qui faisait la différence. Par moments, on le sait, les foils sont pénalisants en terme de vitesse dans le petit temps, face au vent ou quand on tire des bords. Sur le Vendée Globe, on sait que ces conditions-là ne sont pas dominantes. On espère que les foils feront la différence sur le Vendée Globe. Il y a pas mal de questions qui se posent aussi au niveau des bateaux « ancienne génération » : on met des foils ou pas ? » Cela va être la question des chantiers d’hiver. Certains le feront d’autres pas. Et on verra qui aura raison ».